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Choupie-chat, Papa-chat, la vie et moi...
12 juillet 2017

Les enfants sont-ils naturellement violents ?

J'ai eu dernièrement une dicussion très intéressante avec ma petite soeur, que vous devez remercier puisqu'elle vous vaut un billet dans cette période de disette creux.

Ma petite soeur (de neuf ans ma cadette) me demandait donc si Choupie était sage. Vaste question. Je ne considère pas Choupie comme une enfant difficile. Elle a un fort caractère, c'est certain, mais elle est toujours gérable, ce qui est pour moi le critère numéro 1. Non je ne suis pas à deux doigts d'appeler Super Nanny. Loin de là. Le pire qui puisse se passer, c'est que je crie moi et que je la laisse crier elle. Jamais elle ne nous tape, ne nous insulte ou ne désobéit quand c'est important. Pour moi, c'est donc un enfant plutôt sympa.

Enfin, pour un enfant de 3 ans, quoi. Bien sûr qu'elle hurle, s'oppose et fait parfois sciemment le contraire de ce qu'on lui dit. C'est peut-être ça qui a fait dire à la coiffeuse de mon mari, qui est aussi notre voisine (si si, vous savez, ces fameux voisins devant lesquels je baisse les yeux en me souvenant de mes cris de poissonnière) : "Oh ben dites donc, elle a pas l'air facile, votre femme fille !" Bref, pour moi Choupie est facile, pour les autres je n'en suis pas certaine (mais les autres ont-ils élevé récemment un enfant de 3 ans ?).

C'est donc ce que je dis à ma soeur (en version abrégée, hein, je ne fais pas des tartines aussi longues sur Messenger que sur le blog). Et elle me répond (j'en viens au fait - car oui tout cela n'était qu'une longue introduction ne traitant pas vraiment de violence, puisque je ne trouve justement pas Choupie violente) : "Oh ben un jour de toute façon tu en auras marre, et tu la mettras une heure sur le palier après l'y avoir tirée par les cheveux, comme tu faisais avec moi quand je te faisais chier ! MDR" (sic)

Silence (enfin, non réponse). Ce n'est pas la première fois que ma petite soeur me rappelle ce genre d'anecdotes très très loin de la ligne de conduite bienveillante que je me suis fixée en tant que mère, et à chaque fois cela me met mal à l'aise. Cette personne, celle qui maltraitait sa petite soeur (même ses petites soeurs, mais la première était quand même plus à même de se défendre, n'ayant que deux ans de moins, et elle me le rendait bien), ce n'est pas quelqu'un en qui je me reconnais. Ou plutôt c'est quelqu'un en qui je me reconnais trop. C'est la personne brute et sadique en moi, c'est une part de moi que je déteste mais qui durant ma jeunesse pouvait se montrer très facilement dans l'initimité de mon foyer, brisant en un instant la façade douce et discrète que j'offrais au reste du monde.

Bref, une nouvelle fois ma soeur me met face de ce moi non assumé, et je me sens acculée au moment de répondre. D'autant plus que sur Messenger, il est relativement compliqué de répondre par un bredouillement incompréhensible (bmfrmftulavésurmenbienmérité) et de changer de sujet. Mais cette fois-ci, les dieux de la rhétorique sont avec moi, et je trouve finalement la parade, après quelques secondes de mutisme (pendant lesquelles, après tout, j'aurais pu faire n'importe quoi : on n'est pas obligé de répondre de suite, si ?) : "Non mais Choupie n'est pas ma soeur."

Et d'un coup, je sens que je touche un truc. J'ai sans doute raison de culpabiliser et de détester cette part sombre en moi, qui s'exprimait beaucoup trop facilement quand j'étais plus jeune. Mais nous n'étions que des enfants. Moi autant qu'elle. Enfin, moi un peu moins qu'elle puisque j'avais neuf ans de plus, mais bon, je n'étais pas adulte non plus. Et contrairement à ce que j'ai pensé plus ou moins inconsciemment toute ma vie, je n'avais aucun rôle éducatif à son égard. Certes ce n'est pas joli joli, ces souvenirs, mais ils ne réfèrent pas à une sorte de vie antérieure de mère violente. Je n'ai jamais été violente avec mes propres enfants. Je l'ai été avec ma soeur, comme un enfant peut l'être avec un autre. Et une partie de cette culpabilité que je traînais depuis des années s'envole quand je le réalise.

Et puis de mon point de vue de mère cette fois-ci, une autre chose me frappe (chacun son tour, MDR... ou pas) : que faisaient mes parents pendant que ces choses-là se passaient dans leur maison ? C'est vrai que je me faisais disputer pour ces initiatives éducatives un brin musclées (c'est peut-être pour ça que la fameuse émission de télé s'appelle "Pascal le grand frère" ? je crois que je tiens encore un truc). Mais pas à chaque fois (généralement quand il y avait une trace, genre un bleu, une aiguille à tricoter dans l'oeil ou une brûlure d'encens - non mais l'aiguille et l'encens, c'était pas moi, c'était mon autre soeur !), et surtout après coup.

"On était grandes et capables de se garder toutes seules." De toute évidence non. 

"Et de toute façon, c'est normal de torturer ses frères et soeurs plus jeunes (dixit ladite petite soeur torturée, décidément pas rancunière). Toutes mes copines l'ont fait ou ont été elles-mêmes torturées par leurs grands frères et soeurs."

Ça aussi c'est intéressant. Est-ce que comme je le crois, la violence éducative (ça peut tout à fait être ce qu'on appelle la VEO, la violence éducative ordinaire : les punitions humiliantes, les tapes, les remarques blessantes, les cris...) engendre la violence de enfants ? Il est clair que dans mon esprit d'enfant, si mes parents avaient le droit de me mettre des claques, j'avais le droit d'en mettre à ma soeur. S'ils ne m'en avaient jamais mis, est-ce que j'en aurais mis à ma soeur ? De même s'ils ne m'avaient jamais punie en m'enfermant, est-ce qu'il me serait venu à l'idée de le faire à ma soeur ? Ou du moins m'y serais-je sentie autorisée ? J'ai tendance à croire que non... mais le fait que toutes les amies de ma soeur aient fait ou subi des choses similaires m'interroge.

Bien sûr, ça ne prouve rien : les amies de ma soeur ont peut-être aussi été élevées dans cette même violence ordinaire, qui était encore plus ordinaire il y a vingt ans. D'ailleurs, au risque d'être cliché, moi et ma tête de première de la classe, on a beaucoup d'amies filles de profs (ou d'intellectuels gauchistes idéalistes de tout poil) et c'est vrai que je n'ai jamais entendu de pareilles choses chez elles. Alors que ma petite soeur et son caractère revêche rebelle a des amies venant de milieux beaucoup moins progressistes que les miennes... Donc le lien milieu violent (même si dans mon cas, mes parents n'étaient pas maltraitants : je reproduisais bien ce qu'ils faisaient, mais puissance 3)/enfant violent semble exister.

Pour autant, je suis une adulte on ne peut plus pacifique, et même pacifiste. L'idée de faire à mes filles ce que je faisais à mes soeurs me remplit littéralement d'horreur et jamais je ne suis ne serait-ce que tentée de lever la main sur elles. Peut-être est-ce grâce à (mes amies filles de profs vivant chez les Bisounours,) mes lectures, mes études, ma construction intellectuelle progressive (et progressiste). Peut-être que j'ai juste grandi. Mais si je suis devenue non violente juste en grandissant, est-ce que ça ne veut pas dire qu'il y a dans l'enfance un potentiel de violence ne demandant qu'à s'exprimer ? Est-il condamné à s'exprimer quoi qu'il arrive ? Et si on ne lui permet pas de s'exprimer, ne doit-on pas trouver un moyen de lui permettre de s'extérioriser par un autre biais ?

Ma soeur concluait la discussion par : "De toute façon, avec trois ans d'écart, ce sera un miracle si elles ne se tapent pas dessus." Moi j'ai toujours cru que c'était possible, d'avoir la maison des Bisounours. Avec des disputes, certes, mais sans scalpages et éborgnements routiniers. Mon côté idéaliste gauchiste sûrement. Mais c'est vrai que cette discussion m'a fait réfléchir à tout ce qui est pulsions, reproduction, rôle des parents (je dois avouer que comme mes parents - dont j'admire une partie de l'éducation et notamment celle-ci -, je suis plutôt branchée non interventionnisme), alors j'espère que dans quelques années, ce ne sera pas la guerre des tranchées dans mon salon...

2017-07-10_0001

(Non cet article n'apporte aucune réponse, désolée... il fait moins analyse que psychanalyse... mais je veux bien avoir vos expériences - d'enfants, de frères et soeurs, de parents - pour faire progresser ma réflexion...)

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Commentaires
K
Oui tout à fait. Mais rien de définitif si l'on en croit certaines théories du comportement visant à réactiver ou changer les circuits neuronaux "défectueux" ou encore la neurologie qui fait des progrès spectaculaires ces dernières années, aujourd'hui capable d'intervenir directement sur nos gênes.<br /> <br /> Des outils à mettre entre de bonne mains toutefois :/ .<br /> <br /> <br /> <br /> J'aime bien l'idée de me sentir comme une super héroïne! Je n'avais pas vu ça comme ça, mais je plussoie :) .
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K
Pour apporter ma petite pierre à l'édifice, j'ai lu plus haut parlé d’inné et d'acquis et je suis 100% d'accord<br /> <br /> J'ai des centres d’intérêts très hétéroclites et je me surprends parfois à écouter jusqu'à tard dans la nuit un ces documentaires passionnants sur le patrimoine génétique ou certains crimes irrésolus (je crois qu'ils doivent avoir une vie démesurément passionnante les psychologues criminels!).<br /> <br /> Hors, a priori, les études démontrent que, que l'on soit jovial ou taciturne, zen ou angoissé, tout cela est écrit dans nos gênes et c'est élément de notre environnement qui va mettre ce gêne sur "ON". Ce qui veut dire que si l'on a eu un parent usant (pas maltraitant non plus) de violence, ce qui est mon, cas, et qu'en plus ils nous a transmis le mauvais gêne, et bien.. on est mal... hihi.<br /> <br /> De plus certaines études ont démontré que le fonctionnement du cerveau dans une "population" de criminels données est exactement identique. Ils ont observé ses caractéristiques chez des individus vivant le plus "normalement" du monde, mais ceux-la, contrairement aux criminels en question avaient bénéficié enfant d'une famille aimante et bienveillante., quand les autres trainaient les foyers, les rues ou étaient maltraités.<br /> <br /> C'est un peu la face caché du pouvoir, celui qu'on a sur les autres (ça fait un peu spider man ou Harry Potter, mais la littérature regorge de ce genre d'exemples. Lisons Machiavel).<br /> <br /> Très bon sujet en tout cas :) .
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M
Encore un sujet qui fait bien réfléchir ! <br /> <br /> Pour ma part j'ai plutôt l'impression qu'il y a des deux : une part de violence innée et une part de violence acquise par mimétisme de l'entourage. <br /> <br /> Petite j'ai toujours eu la réputation d'être une enfant facile, et même à l'adolescence je n'ai jamais eu de conflit majeur avec mes parents. Mon petit frère par contre a toujours été beaucoup plus remuant et aimant beaucoup la prise de risques. Et pourtant nous nous sommes très peut battus (voire même jamais, vu que je n'en ai pas souvenir). Nous nous disputions mais plutôt avec des mots, des cris ou alors une violence envers les objets (j'ai en tête une construction légo de mon frère sauvagement piétinée par moi même en représailles d'un dessin déchiré de sa part !). J'ai bien du prendre 1 ou 2 claques sous le coup de la colère de la part de mes parents, mon frère peut être quelques unes de plus mais globalement les crises se réglaient dans les cris puis la discussion plus qu'avec des gifles ou des punitions. <br /> <br /> Et pourtant quand à 15 ans mon frère, qui était sorti faire du vélo avec des copains après le repas du soir, en l'absence de mes parents, n'est pas rentré à l'heure prévu, n'a répondu à aucun appel de ma part et est arrivé à minuit passé avec un grand sourire en me demandant à moi qui l'attendait morte d'inquiétude "mais tu n'es pas encore couchée ?", s'est pris une baffe monumentale de ma part ! Je crois que plus de 10 ans après je m'en veux encore d'avoir réagit comme ça (bon lui visiblement m'a pardonné, il ne s'en souvient même plus ! ;-) ). <br /> <br /> Alors je me dis que finalement si je n'avais jamais jamais reçu de gifle peut être que je n'aurais pas réagit comme ça, mais j'en doute, ça a été tellement spontané !<br /> <br /> Et d'ailleurs la Biscotte a parfois des geste un peu violent avec nous quand elle veut quelque chose et que nous ne comprenons pas ce que c'est. Pourtant elle n'a jamais reçu la moindre tape et pour l'instant nous n'avons jamais vraiment crié (on se réserve pour quand on aura une fratrie ;-) ) et jamais puni. <br /> <br /> Pour autant, j'ai un couple d'amis qui fonctionne pas mal par punition et cris avec leur fils qui a quelques mois de plus que la Biscotte et, coïncidence ou pas, le petit bonhomme commence a avoir des comportements violents avec les copains de crèche. Alors je me dis qu'il doit y avoir un peu des deux et que ce qu'il y a de mieux à faire c'est de se maîtriser nous même du mieux que nous pouvons et d'expliquer et d'apprendre à nos enfants à canaliser leur violence.
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M
Dès l'introduction, je me suis dit qu'on disait souvent que mon ainé était facile, je le pense aussi, mais selon ta définition ça colle pas, parce que je me mange régulièrement des tartes. Oui mon fils me frappe, quand il n'est pas content, quand il est content aussi. Et quand il est très content, il mord ou fait des câlins coups de boule. On essaye de lui apprendre à ne pas taper, du coup, où il tape les objets alentours ou il se frappe lui même ... Violence? Agressivité?<br /> <br /> Pourtant nous on ne le frappe pas, mais il est déjà arrivé qu'il ait une tape sur la cuisse, en général en réponse à sa propre violence (beaucoup de coup de pieds lors des changes). Oui bon, on est d'accord, ça ne sert à rien. Pour moi c'est normal,disons que c'est naturelle. Y a qu'à voir les animaux comme ils s'écharpent entre eux. Ca ne veut pas dire qu'il faut laisser faire, comme on est des animaux sociaux, on a intérêt à la canaliser cette pulsion. En fait, tu poses une question très philosophique : le violence, comportement inné ou acquis?<br /> <br /> Moi j'ai eu pas mal de problème de violence ou d'agressivité dans mon enfance puisqu'à la maternelle on m'appelait le 'petit chat' puisque je mordais et griffais mes camarades ... J'en ai une qui s'en souviens encore (les autres ne me parlent plus). Je me souviens aussi d'un voyage avec mon père et ma cousine où elle est revenue avec des marques de griffures pleins les mains (j'avais 10-12ans). Pourtant mes parents n'étaient pas violents, en tout cas je ne me souviens pas. Par contre je me souviens que quand j'étais très énervée, mon père s'amusait à m'enerver encore plus ... tout ça pour dire, mis à part que mon père est un con, qu'à mon sens, les enfants ont ce sadisme et cette violence en eux mais que c'est à nous parents de leur apprendre à la canaliser et à la laisser s'écouler autrement qu'avec les poings.
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C
Ton article est très intéressant et le rappelle beaucoup de choses (car nouveau point commun entre toi et moi : je suis aussi l'aînée avec deux et neuf ans d'écart, sauf que moi ce sont des frères).<br /> <br /> Avec le premier, j'ai été très violente et lui aussi : écrasage de tête par terre, lançage de pierre sur le crâne, gifle, coup de pied,... On a grandit ensemble avec quasiment le même âge et je suis persuadée que la violence est en chacun de nous et que nous apprenons simplement à la canaliser en grandissant.<br /> <br /> Pour mon second frère beaucoup plus jeune, j'ai été beaucoup moins violente. je me rappelle d'une fois où je l'ai poussé pour l'empêcher d'entrer dans ma chambre et je m'en suis énormément voulue ensuite. J'avais plutôt une relation de "petite maman" avec lui : je le cherchais à l'école, lui faisais à manger, l'aidais pour ses devoirs, lui racontait des histoires le soir,...
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