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Choupie-chat, Papa-chat, la vie et moi...
24 mai 2017

Sur le fil du baby blues

Cet article, il a longtemps brigué la priorité avec un autre qui aurait dit tout l'inverse (si si, c'est possible), à savoir à quel point c'est facile d'avoir un deuxième bébé. Malgré la contradiction apparente, je ne renonce pas encore à l'écrire, il verra peut-être le jour un peu plus tard. Ce ne sera pas mal de toute façon d'avoir un peu de recul sur le sujet.

Celui-ci parle donc de fragilité psychologique à la naissance du second enfant. De la mienne du moins, je ne prétends pas que c'est universel. Après un mois de cohabitation avec Kitty, il aurait presque pu s'appeler "sur le fil de la dépression post-natale", d'ailleurs, car dans la typologie traditionnelle, le baby blues ne dure que quelques jours. Mais bon, ça faisait un peu tragique de mettre "dépression" dans le titre, et on n'en est quand même pas à ce point.

Il vous surprendra peut-être, puisque je pense que l'impression qui ressort de ma seconde expérience de maternité, c'est la sérénité, l'apaisement, l'épanouissement oserais-je même dire. Mais c'est bien là tout le paradoxe.

2017-05-24_0001

Pour cette grossesse et ce bébé, j'avais de grandes aspirations.

Pour Choupie, je partais la fleur au fusil, certaine que la grossesse allait être une aventure magique et mon bébé le plus merveilleux du monde. Oui, j'ai une nature plutôt optimiste (je sais que ça ne se voit pas forcément car je suis extérieurement plutôt cynique, mais je vous assure que j'ai un fond optimiste), et je crois aussi à la pensée performatrice (ce qu'on appelle en somme la méthode Coué : si tu y crois très fort, ça se réalisera). Du coup, je suis franchement tombée de haut quand j'ai vécu une grossesse de l'enfer, suivie de premiers mois de l'enfer avec un BABI insatiable, inconsolable et indécollable.

Pour Kitty, il était hors de question que je revive la même chose. Hors. De. Question. J'avais toujours mon optimisme et ma croyance en la pensée performatrice, mais boostés aux stéroïdes, et exit la fleur au fusil. C'était ça ou rien. Je me suis lancée dans ma seconde maternité comme je serais partie en guerre, mais cette fois-ci, aucune fleur à mon fusil, une baïonnette férocement dardée vers les ennemis fatigue, anxiété, déprime, bébé glue. Ma seconde grossesse serait une grossesse parfaite, mon second bébé serait un bébé parfait, ou ils ne seraient pas, tout simplement. Tomber une nouvelle fois de haut ? Inenvisageable. Alors j'ai tout fait dans ce sens.

Pendant ma grossesse, j'ai continué à bouger, à travailler, à voir du monde, je ne me suis privée de rien (surtout pas de nourriture, ma balance en est témoin), j'ai continué à prendre soin de mon apparence (enfin, autant qu'habituellement, quoi, rien de foufou non plus). J'ai lutté activement contre l'ennui, le laisser-aller et l'isolement. Et pareil quand Kitty est née.

Mon accouchement, je l'ai voulu sans péridurale : ainsi j'en ai contrôlé chaque minute. Je me suis déplacée seule jusqu'à la table d'accouchement, et jusqu'au fauteuil qui me ramenait dans ma chambre. Je suis allée seule aux toilettes quelques minutes plus tard, j'ai même pris très vite une douche pour me débarrasser au maximum du sang qui maculait mon entrejambe. Au matin, j'ai remplacé la blouse d'hôpital par un chemisier à fleurs. Le lendemain, les slips-filet et les protections géantes par des slips en coton et des protections classiques. Le sur-lendemain (qui était donc le jour 2, puisque j'ai accouché à 1h du matin), on me proposait de sortir et j'acceptais avec enthousiasme... sauf que Kitty n'avait pas pris assez de poids, zut ! 

Je suis rentrée chez moi au matin du troisième jour, et dès l'après-midi, j'ai laissé Kitty à son père et je suis allée voter avec Choupie. J'ai reçu des gens dans une maison propre. Tous les weekends pendant plus d'un mois. Même parfois plusieurs fois par weekend. J'ai continué à gérer Choupie, ma maison, ce blog (tant bien que mal) et mes relations sociales. J'ai continué à me coiffer et m'habiller correctement. Nous ne nous sommes jamais privés de sortir faire un tour avec Kitty. Et depuis la reprise de Papa-chat, je prépare seule mes deux filles (et moi-même) tous les matins pour emmener Choupie chez sa nounou.

Il faut dire que je suis bien aidée : je ne sais pas si c'est de la chance, ma pensée performatrice ou mes efforts conscients pour qu'elle soit détendue et un minimum autonome, mais Kitty est un bébé facile. Elle pleure peu, se calme vite et facilement avec un câlin ou une sucette, accepte d'être posée (parfois), dort plusieurs heures d'affilée dans son lit ou son couffin. En plus elle est belle et elle sent bon.

Tout cela vous semble peut-être naturel, évident, mais c'est en vérité l'exact inverse de ce qu'a été mon expérience avec Choupie (bon elle était belle aussi, par contre en effet elle sentait un peu le fromage). Pour Choupie, j'ai passé le premier mois sous l'eau, débordée, épuisée, n'arrivant plus à me laver (un comble quand tu es sous l'eau, ha ha), à m'habiller, à manger, et évidemment pas à faire le ménage. Le bébé au sein et des hurlements dans les oreilles H24. Tous les jours j'accueillais Papa-chat rentrant du travail avec les larmes aux yeux et un bébé en crise. Je ne suis pas sortie avant plusieurs semaines et ma vie sociale se résumait à une tonne de photos de bébé sur les réseaux sociaux et aux quelques personnes qui venaient me voir (hirsute dans une maison sale, donc). J'en ai un peu parlé ici, de cet avachissement des premiers temps, et je ne voulais surtout pas le revivre.

Globalement, j'ai plutôt réussi mon coup. Tout le monde vous dira que j'ai l'air en forme et que mon bébé a tout d'un bébé de magazine (sauf les cheveux blonds et les yeux bleus, mais je n'y tenais pas spécialement : je voulais une brunette et même ça je l'ai eu). Je semble donc assurer parfaitement et nager en plein bonheur. Je n'ai d'ailleurs pas fait de baby blues. Du tout. Pas même le petit habituel à la maternité. Rien, que dalle, nada. Sauf que.

Sauf que le soir, je m'endors systématiquement devant la télé tellement je suis crevée. Sauf que parfois je zappe de changer et de nourrir Kitty tellement j'ai envie de me coucher. Sauf que je n'ai repris aucune activité sexuelle et que je n'en ai pas la moindre envie. Sauf que si Papa-chat n'est pas là pour me relayer avec les files et faire à manger, je ne petit-déjeune pas le matin, petit-déjeune à midi, et finis donc par me passer de déjeuner. Sauf que j'ai trois semaines de retard dans la lecture de mes blogs préférés (désolée les copines !).

Sauf que, surtout, notre vie de famille actuellement n'a rien de celle de la famille Ingalls. A ceux qui me demandent comment ça se passe pour Choupie, je réponds invariablement la même chose : qu'elle est très gentille, très douce et très attentionnée avec sa soeur, mais qu'on sent tout de même qu'elle est perturbée, parce qu'elle nous sollicite beaucoup plus, fait le double de bêtises (présentement elle est en train de retirer tous les livres de notre bibliothèque...) et crise à la moindre contrariété. Déjà ce n'est pas très famille Ingalls style. Mais le pire, je crois, c'est que je ne suis pas sûre que ce soit Choupie qui soit la plus en cause. Celle qui a le plus perdu son calme, sa patience et sa bienveillance dans l'histoire, c'est moi. Alors forcément, tous les petits conflits se transforment en bras de fer...

Sauf que, surtout, je pleure souvent, je n'arrive pas à réfléchir rationnellement face à un obstacle. Je pleure parce que Choupie est constipée. Je pleure parce que Kitty ne prend pas assez de poids. Je pleure parce que Choupie n'est pas propre à 3 ans (j'insiste sur le mot "propre", car elle est continente, donc à moins qu'il existe un mot pour désigner l'absence de volonté de retirer sa couche...). Je pleure parce que Kitty dort trop. Je pleure parce qu'elle ne veut pas dormir. Je pleure parce que j'ai disputé Choupie pour une broutille. Je pleure parce qu'on est en retard chez la nounou. Je pleure parce que je suis fatiguée et que je ne sais pas quand je le serai moins.

Sauf que, surtout, j'ai ces pensées qui me viennent, ces pensées qui sont clairement des pensées de baby blues, pas des pensées de mère qui assure, qui assume, qui est forte, qui prend sur soi et qui relativise : je fais tout de travers, je ne sais pas m'occuper d'enfants, je ne sais pas éduquer les enfants, je suis en train de leur pourrir leur vie, elles vont finir en thérapie à cause de moi (si elles survivent à l'enfance) (ce qui n'est pas certain), pourquoi j'ai fait un enfant, pourquoi j'ai fait un second enfant, comment peut-on me confier des enfants, comment font les autres (à qui tout réussit, qu'on me dise mes fautes... pardon), etc etc.

Je sais que la déprime, c'est quelque chose auquel je suis sensible. Et je me sens d'autant plus menacée cette fois-ci que ma mère a fait une dépression post-partum à la naissance de ma soeur. Pourtant, nos histoires de maternité ne se ressemblent pas. Enceinte, elle n'avait pas de nausées et beaucoup de contractions, j'avais peu de contractions et beaucoup de nausées. Elle a aimé ses grossesses, je les ai détestées. Ses accouchements ont été épouvantables, les miens se sont tous les deux passés parfaitement. Elle a toujours regretté de ne pas avoir pu faire de quatrième enfant, j'ai juré de m'arrêter à deux malgré les dix bonnes années de fertilité que j'ai encore devant moi. Le jour et la nuit. Et pourtant il y a dans notre famille quelque chose de fort qui lie les femmes entre elles, au-delà de leurs histoires, leurs physiques, leurs caractères, leurs convictions, qui fait qu'il m'est difficilement envisageable de prendre un autre chemin.

Mais je ne l'accepte pas, tout mon corps et mon esprit se battent contre cette idée. Je ne veux pas être cette mère-là, je ne peux plus être cette mère-là. J'ai déjà laissé tomber mon mari (plusieurs fois, y compris cette année), j'ai déjà vécu en apnée pendant plus d'un an... Je n'ai plus le droit à l'erreur, je refuse de me l'accorder... Alors je sèche mes larmes, je relève la tête, j'embrasse mes filles et je repars sur le mode "je suis invincible, deux enfants easy peasy je gère la fougère, je peux tout faire en même temps et la déprime ne passera pas par moi". Sur le fil.

***

J'ai commencé à écrire cet article il y a plusieurs semaines, et l'idée a germé dans ma tête depuis pratiquement le tout début de la vie de Kitty (une fois que la musique "Eye of the tiger" qui s'était enclenchée durant mon accouchement s'est dissipée). Je crois que depuis quelques jours ça va mieux : même si je suis toujours très fatiguée, je ne pleure quasi plus et j'ai beaucoup moins d'idées noires. (Par ailleurs mon bébé parfait se déparfaitise un peu en grandissant, mais c'est un autre sujet.) Je me suis donc posé la question de la pertinence de le publier. Peut-être qu'au final, un billet "Wouhou comment c'est facile d'avoir deux enfants" serait plus représentatif de mon état d'esprit actuel. Mais il faudrait que je l'écrive et j'ai la flemme surtout que je suis à la bourre dans mes publications je pense qu'il peut être intéressant de montrer aussi que, contrairement à ce que j'ai énormément entendu (et même approuvé !), ce n'est pas toujours si évident d'être mère pour la deuxième fois. Du fait du premier enfant, dont on doit continuer à s'occuper à peu près normalement (ah bon, on ne peut pas le mettre en colonie de vacances pendant six mois ?), et probablement d'une certaine attente de la société (tu as déjà un enfant, tu sais faire, n'est-ce pas ?), la pression est très forte et on a tendance à intérioriser notre fatigue et nos faiblesses. Ça ne veut pas (toujours) dire qu'elles ne sont pas là, tapies dans l'ombre, prêtes à nous sauter à la gorge à la première occasion. Alors voilà, c'est mon message du jour : mamans de seconds (ou de troisièmes, ou de quatrièmes), vous non plus, ne vous oubliez pas les premiers mois, prenez soin de vous ❤

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Commentaires
G
Bonjour,<br /> <br /> <br /> <br /> Je découvre ton blog avec ce texte doux-amer, ironique et tendre. J'ai vécu une longue déprime latente à l'arrivée de ma deuxième fille. La première avait connu une première année de vie abominable, hospitalisée et transfusée tous les quinze jours environ. J'étais resté joyeux, insolemment, anormalement en fait. Je rigolais à l'hôpital, comme si de rien n'était. J'étais seul, sa mère n'ayant pu écaisser la culpabilité d'avoir transmis au moins un gène défectueux à sa progéniture. Moi, j'avais complété la paire d'as avec une seconde allèle foireuse, et pourtant j'assumais pleinement ma paternité. Une maladie génétique, c'est pas une maladie, pas un truc qu'on attrape ; mais une particularité qui fait de ma fille ce qu'elle est. Je ne la voudrais pas autrement qu'elle-même, quelle que soit la suite de son histoire. Pourtant, à la naissance de sa petite sœur, d'un second mariage, en pleine santé, tonique (ah ça...), joyeuse, avec sa tête de magazine (blonde aux yeux bleus, toute comme je l'avais pensée, imaginée, vue à travers le ventre) ; à sa naissance, donc, j'ai déprimé sec. Je crois qu'avec cinq ans de décalage j'ai craqué. Affronter les crises, je savais faire ; être heureux en toute quiétude, j'avais oublié. J'ai retravaillé quelques mois plus tard, après l'avoir portée en écharpe, peau contre peau, en pleurant et souriant en même temps. Et puis c'est passé.<br /> <br /> <br /> <br /> Merci encore pour ton texte. Je vais te lire, ce que tu as écrit et ce que tu écriras, avec beaucoup d'intérêt.
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E
J'espère que les choses évoluent doucement depuis ton article ! Tu es trop dure avec toi même. Je suis certaine que tu gères du mieux que tu peux. Tu te mets sans doute de la pression ? Disons que je le suppose, car je suis aussi comme cela. Même si c'est le deuxième, c'est une nouvelle organisation à quatre; et surtout tu dois être épuisée; et c'est normal. Je t'envoie plein de positif ;-)
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M
Tu es beaucoup trop dure avec toi même !!! Les mères parfaites ça n'existe pas et les maisons qui brillent H24 non plus ! Il m'arrive d'être dans le même état que toi avec une seule minicouette !<br /> <br /> <br /> <br /> La fatigue y est aussi pour beaucoup dans ces moments là. Les nuits blanches te transforment ! Tu perds patience plus vite, tu pleures pour rien et tu culpabilises, c'est un cercle vicieux mais ça ne durera pas ! Il faut juste du temps pour trouver son équilibre. <br /> <br /> <br /> <br /> Ne désespère pas. Plein de courage à toi ! Bises
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M
J'arrive aussi un peu après la bataille, mon cerveau de poisson rouge a lu ton article, l'a aimé et s'est ensuite persuadé d'avoir écrit un commentaire. Donc en venant voir si tu avais eu le temps de répondre (et j'imagine que ça doit être bien compliqué de trouver le temps de suivre ton blog avec tes 2 pépettes, surtout en écrivant des articles aussi denses et qui suscitent donc moult commentaires !) je viens de voir que je n'avais en fait rien commenté du tout. <br /> <br /> Le jour où j'ai 2 enfants je vais sombrer dans la poissonrougite aiguë c'est sur !<br /> <br /> <br /> <br /> J'espère donc que tu as depuis basculé du bon coté du fil, loin de la déprime. Bien sûr j'imagine que c'est un peu en dents de scie, lié à l'humeur de tes deux puces...<br /> <br /> Je pense qu'il faut beaucoup de temps finalement pour récupérer peu à peu de la fatigue.
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A
J'arrive 1 semaine après la bagarre, alors d'abord j'espère que l'amélioration de ton moral s'est poursuivie.<br /> <br /> Je pense que c'est bien que tu aies écrit ce texte, parce qu'en effet, c'est utile de dire les choses, simplement, que la maternité ce n'est pas toujours tout rose, pour le premier, le second ou quand les enfants ont 10 ans !<br /> <br /> J'ai été touchée par ton récit d'une situation à deux faces : je ne penses pas qu'on fasse exprès de donner une apparence d'assurance alors qu'on se sent tout fragile dans l'intimité, j'imagine que c'est un mélange de modèle de solidité qu'on nous donne et d'autopersuasion et d'autoencouragement ("j'assure"), mais personnellement, j'ai constaté que ça empêche parfois les gens de se rendre compte du problème, juste parce qu'ils ne le voient pas. Du coup, je trouve ça super que tu racontes ça, comme ça d'autres mamans pourront se reconnaitre, se rendre compte que ce n'est pas anormal de craquer, mais aussi que ce sont des signes à prendre en compte...<br /> <br /> Je te souhaite du repos et de la sérénité avec ton bébé pas-si-parfait et ta grande fille qui ne me parait pas si anormale de refuser d'enlever la couche à 3 ans (en relisant mon carnet de santé, j'ai vu que j'avais fait pareil - OK, je suis en thérapie, mais je ne crois pas que ce soit pour ça ;) )
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